Plateforme multimodale du Grand Est avec train de fret, barge et camions en activité

Grand Est : la Stratégie Fret 2025-2030 pour décarboner le transport de marchandises

Stratégie Fret Grand Est : la Région lance un plan 2025-2030 visant à réduire fortement les émissions liées au transport de marchandises, en misant sur le rail, le fluvial, la rénovation des lignes capillaires et des infrastructures logistiques. Ce premier paragraphe pose l’essentiel : une feuille de route régionale adoptée en octobre 2025, une volonté d’orienter les flux vers des modes moins émetteurs et des financements ciblés pour accompagner les entreprises.

Pourquoi une stratégie régionale pour le fret ?

Le Grand Est concentre un tissu industriel dense (agroalimentaire, automobile, chimie) et des corridors logistiques transfrontaliers. Aujourd’hui, plus de 84% des tonnes-kilomètres de marchandises en région restent routières, d’où une forte vulnérabilité aux émissions et aux coûts liés aux carburants. La Stratégie Fret Grand Est entend réduire cette dépendance en favorisant le report modal vers le ferroviaire et le fluvial, tout en modernisant les capacités locales d’embranchement industriel.

Les mesures phares du plan 2025-2030

La stratégie combine actions d’infrastructures, incitations financières et aides à la transition énergétique. Parmi les mesures clés :

  • Rénovation de lignes capillaires : régénération de 12 lignes d’ici 2028, budget annoncé de 96,7 M€ dont 36 M€ mobilisés par la Région;
  • Développement de plateformes multimodales : création et aménagement de terminaux pour faciliter les échanges rail/route/fluvial;
  • Soutien aux raccordements industriels (ITE) : enveloppe de 20 M€ pour favoriser les installations terminales embranchées et raccorder les sites industriels au rail;
  • Accélération du fluvial : investissements ciblés pour le réseau fluvial (partie du CPER) afin d’augmenter la capacité et la compétitivité des voies d’eau;
  • Transition énergétique : déploiement de stations bioGNV, aides à l’électrification des terminaux et aux solutions bas carbone pour les flottes poids lourds.

La Région détaille ces éléments dans sa note de présentation officielle disponible sur le site institutionnel : fiche stratégique Grand Est 2025‑2030.

Financement et calendrier

Le financement s’appuie sur plusieurs briques : fonds régionaux, CPER (Contrat de Plan État-Région), cofinancements nationaux et contributions sectorielles. La Région a chiffré des montants par grandes lignes : 155 M€ pour le fret ferroviaire, 73,5 M€ pour les plateformes multimodales et 136 M€ pour le fluvial (répartition issue du CPER 2023‑2027). Un mécanisme d’auto‑financement, l’Eco‑Contribution Poids Lourds (ECPL), est annoncé pour 2027 afin de sécuriser des ressources propres et d’inciter au verdissement des flottes.

La mise en œuvre est progressive : premières rénovations de lignes et financements d’ITE dès 2026, livraisons de plateformes multimodales 2027–2029 et montée en charge du fluvial sur la période 2026–2030. La Région vise des premières économies d’émissions significatives à l’horizon 2028.

Quels gains attendus ? Chiffres et objectifs

La collectivité avance des ambitions mesurées : gain de plusieurs centaines de milliers de tonnes-kilomètres en mode décarboné, déplacement de flux représentant l’équivalent de dizaines de milliers de poids lourds par an vers le rail et le fleuve. La Région évoque un potentiel d’évitement d’environ 200 000 poids lourds annuels sur les principaux corridors concernés si les axes et plateformes sont pleinement opérationnels.

Concrètement, la rénovation de 12 lignes capillaires doit permettre d’augmenter la capacité ferroviaire locale de plusieurs dizaines de trains par semaine sur des axes stratégiques, améliorant ainsi la desserte des zones industrielles.

Impacts économiques et industriels pour les territoires

Pour les directeurs d’usine et responsables logistiques, la stratégie ouvre des opportunités concrètes : réduction des coûts logistiques unitaires via le rail pour les trajets longs, sécurisation des approvisionnements grâce à des embranchements ferroviaires et optimisation des stocks par une meilleure predictibilité des voies fluviales. Les PME‑ETI industrielles peuvent accéder à des aides à l’ITE pour raccorder leurs sites, ce qui diminue la dépendance aux transports routiers.

La stratégie devrait aussi créer des emplois liés aux chantiers (infrastructures ferroviaires, aménagements portuaires) et soutenir des métiers logistiques plus qualifiés dans les plateformes multimodales. Selon les estimations régionales, les programmes du CPER mobilisés vers le fret représentent plusieurs centaines de millions d’euros d’investissements directs sur la période.

Réactions locales et points de vigilance

La mesure de l’ECPL annoncée pour 2027 suscite des réactions contrastées : si certains acteurs saluent l’existence d’un financement pérenne, des organisations de transporteurs craignent un alourdissement des coûts pour les PME routières. Les responsables régionaux ont prévu des concertations pour caler les modalités (exonérations ciblées, paliers, aides au renouvellement de flotte).

Plusieurs collectivités locales et élus territoriaux ont demandé des garanties sur la coordination des chantiers pour éviter des ruptures de desserte pendant les travaux. Des voix économiques régionales ont aussi rappelé que le succès repose sur la compétitivité tarifaire du rail et sur des délais de réalisation maîtrisés.

Mise en œuvre opérationnelle : acteurs et gouvernance

La gouvernance associera la Région, SNCF Réseau, Voies Navigables de France (VNF), les opérateurs logistiques et les chambres consulaires. Des comités de suivi territoriaux seront instaurés pour piloter priorités, phasages et appels à projets. La Région propose un guichet unique pour les entreprises souhaitant obtenir un financement d’ITE ou une aide à la transition énergétique.

La stratégie prévoit aussi des études préalables : 30 diagnostics territoriaux sur la motorisation bas carbone (1,5 M€) et un plan de déploiement de 10 stations bioGNV issues de filières de méthanisation (650 000 € d’aide régionale initiale).

Comparaisons et bonnes pratiques observées

La logique de convergence rail/fluvial ressemble aux démarches menées dans d’autres régions européennes : prioriser les corridors, rendre le rail attractif via liaisons directes et rabattement routier optimisé, et financer la bascule par des instruments locaux. Le Grand Est s’appuie sur des retours d’expérience pour limiter les frictions et maximiser le report modal.

Plusieurs rapports sectoriels rappellent que la relation chargeur‑opérateur est centrale : garanties de capacité, créneaux horaires et tarification stable sont des leviers indispensables pour convaincre chargeurs et transporteurs de migrer vers le rail.

Points de suivi pour les 18 prochains mois

  • Lancement des appels à projets pour la régénération des 12 lignes capillaires (2025–2026) ;
  • Calendrier précis pour l’ECPL et modalités de concertation (deadline 2027) ;
  • Mise en service progressive des premières plateformes multimodales (2027–2029) ;
  • Évaluation des premiers effets sur les volumes rail/fluvial d’ici fin 2028.

Ressources et documentation

Pour consulter le document officiel présentant la stratégie, voir la fiche de la Région Grand Est : document officiel Stratégie Fret 2025‑2030. Une couverture média et des analyses locales ont été publiées par la presse régionale : analyse L’Union du 16 octobre 2025 et des précisions techniques ont été relayées par la presse spécialisée Actu‑Transport‑Logistique.

Vers une logistique industrielle plus résiliente

Pour les responsables industriels du Grand Est, la Stratégie Fret Grand Est est une opportunité pour revoir les chaînes d’approvisionnement, négocier des conditions rail/fluvial attractives et planifier des investissements d’accès ferroviaire. Les gains potentiels portent sur la réduction des émissions, sur une meilleure prévisibilité des flux et sur une compétitivité logistique accrue pour les filières exportatrices.

La réussite dépendra toutefois de quatre facteurs : une tarification compétitive du rail, des délais de réalisation respectés, une gouvernance partenariale efficace et des mesures d’accompagnement pour les transporteurs routiers impactés.

Prochaines étapes pour les lecteurs industriels

Directeurs industriels et responsables logistiques devraient d’ores et déjà : initier un diagnostic ITE pour évaluer un raccordement ferroviaire possible, contacter les plateformes multimodales locales pour évaluer des solutions combinées, et suivre les consultations publiques sur l’ECPL pour anticiper les coûts et les aides disponibles.

Ouverture sur les stratégies régionales similaires

Le Grand Est rejoint un mouvement national vers des politiques fret territoriales. L’alignement entre collectivités, opérateurs nationaux et acteurs économiques sera déterminant pour transformer les ambitions en volumes effectivement basculés vers des modes décarbonés sur la période 2025‑2030.

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