Prix de l’économie Néo-Aquitains 2025 : la cérémonie du 9 décembre a mis en avant, en Gironde, des acteurs aux profils très différents mais convergents — des transformateurs agricoles aux start‑ups deeptech — qui participent à la relance industrielle locale. En tête des récits locaux figurent un projet de chips premium implanté dans le Médoc et une jeune entreprise du NewSpace qui développe un lanceur hybride suborbital. Ces lauréats incarnent les stratégies de diversification et d’industrialisation déployées face à une conjoncture nationale marquée par une hausse notable des défaillances d’entreprises et des tensions sur les coûts énergétiques.
Quatre enseignements clés de l’étape girondine
La remise des Prix a confirmé quatre tendances observables dans la région : 1) la montée en gamme des filières agricoles vers la transformation locale, 2) l’émergence de projets deeptech à fort effet d’entraînement industriel, 3) l’importance des financements publics‑privés pour franchir le pas d’industrialisation, 4) la vulnérabilité persistante des PME/TPE face aux pressions financières et énergétiques.
1) Intégration amont‑aval : des champs à l’usine
Le lauréat agricole, identifié localement comme le Groupe agricole JK (marque commerciale Domaine de la Croustille), illustre la stratégie « du champ à l’assiette » : augmentation des surfaces, passage à une production industrielle organisée (organisation en 3×8 pour l’atelier), et premières lignes de transformation installées en Gironde pour produire des chips premium « made in Médoc ». Selon les éléments repris publiquement, le groupe a accru sa surface de cultures et investi plusieurs millions d’euros pour structurer la filière (stockage, lignes de coupe, fours). L’objectif affiché est d’augmenter la valeur ajoutée locale et d’ouvrir des débouchés nationaux et européens (GMS et circuits spécialisés).
2) Deeptech et NewSpace : un effet levier pour l’industrie locale
Autre lauréat notable : une entreprise du NewSpace (citée publiquement comme HyPrSpace) qui a récemment annoncé une levée de fonds substantielle pour industrialiser un moteur hybride et préparer un démonstrateur suborbital (projet dit « Baguette One »). Le développement de chaînes de sous‑traitance mécanique, de bancs d’essais et de qualifications représente un potentiel d’emplois qualifiés et une montée en compétences pour des ateliers locaux. Les partenariats avec la DGA, le CNES et des financeurs publics (France 2030 / Bpifrance) apparaissent comme des catalyseurs indispensables pour passer de la R&D au premier prototype industriel.
Contexte économique et risques structurels
Ces réussites ne s’inscrivent pas dans un vide : la France a connu un niveau élevé de défaillances en 2024 (de l’ordre de ~66 500 procédures selon les bilans publics) et la Gironde, comme d’autres départements, enregistre une hausse des procédures collectives sur les 12 derniers mois, touchant tout particulièrement le commerce, la construction et certaines PME industrielles. La fragilité des trésoreries, la hausse des taux et la montée du prix de l’énergie constituent des freins concrets aux ambitions d’investissement des entreprises régionales.
Pression énergétique : contrainte et opportunité
Le contexte énergétique — volatilité des prix spot, discussions sur l’accès ARENH et risques d’augmentation des coûts industriels — pèse sur les plans de développement. Pour autant, cette contrainte pousse aussi les entreprises à déployer des solutions : optimisation des process, investissements d’économies d’énergie, recours aux moyens de production locale d’électricité (parc photovoltaïque, récupération thermique). Ces initiatives, si elles sont soutenues par des aides régionales et nationales, peuvent améliorer la compétitivité long terme.
Financements, partenariats et trajectoires industrielles
L’histoire de ces lauréats montre l’importance d’un montage financier mixte. Pour les projets agricoles et agroalimentaires, les financements combinent fonds propres, prêts bancaires locaux et subventions régionales pour modernisation d’équipements. Pour les start‑ups deeptech, les tours de table en capital‑risque (levée de l’ordre de plusieurs dizaines de millions d’euros communiquée publiquement pour certains acteurs) permettent d’accélérer la qualification industrielle et de sécuriser les chaînes d’approvisionnement.
Les acteurs locaux (CCI Gironde, collectivités, pôles de compétitivité) et les partenaires publics jouent un rôle de facilitateur : accompagnement à l’export, appui sur les dossiers France 2030, mise à disposition d’infrastructures d’essais. Pour consulter le calendrier officiel et les modalités des Prix, on peut se référer au site institutionnel des Prix de l’économie Néo‑Aquitains.
Exemples concrets et chiffres
- Production agricole : projets évoquent une montée en surfaces cultivées et une sécurisation de la production de pommes de terre pour transformation (plusieurs milliers d’hectares mobilisés pour la matière première).
- Capacités industrielles : mise en place d’unités de coupe/friture en 3×8 et programmation d’une seconde ligne de production pour 2026 chez le transformateur girondin.
- Levées de fonds : certains acteurs spatiaux régionaux ont annoncé des levées significatives (ordres de dizaine de millions d’euros) pour industrialiser des moteurs hybrides et préparer des démonstrateurs suborbitaux.
Impacts locaux : emplois, sous‑traitance et filières
La transition vers la transformation locale permet de capter une part plus importante de la valeur ajoutée. Pour la filière chips, cela signifie des créations d’emplois en atelier (postes de production, maintenance, qualité) et des contrats pour la sous‑traitance mécanique, emballage et logistique. Pour le NewSpace, la création d’emplois qualifiés (ingénieurs moteurs, techniciens bancs d’essais, certification) stimule la demande locale en compétences et peut attirer des prestataires spécialisés.
La dynamique d’achats locaux et de développement de sous‑traitance est la condition pour que l’effet d’entraînement se diffuse au tissu économique girondin, en particulier si les maîtres d’ouvrage favorisent des accords-cadres avec PME locales.
Risques et fragilités à surveiller
Malgré ces signaux positifs, plusieurs risques persistent : 1) une dépendance aux subventions et aux marchés publics pour certains projets deeptech, 2) la fragilité financière des petites unités face aux hausses de coûts (matières premières, énergie), 3) la difficulté à recruter des profils qualifiés à court terme. Les dispositifs d’accompagnement et la montée en compétence des dirigeants restent des leviers cruciaux pour limiter les sorties de route.
Ressources et lectures complémentaires
Pour le compte‑rendu local initial et la liste des lauréats, la presse régionale a publié des synthèses le 9 décembre (article source cité). Exemple d’article de synthèse sur la manifestation et les lauréats : compte rendu Sud Ouest sur les lauréats girondins. Pour le volet NewSpace et la levée de fonds annoncée, voir une synthèse récente : analyse HyPrSpace et stratégie industrielle. Sur le plan législatif et le contexte énergétique national, les débats parlementaires et préconisations récentes offrent des clés de lecture : compte rendu des débats nationaux sur l’énergie.
Axes d’action recommandés pour les dirigeants industriels
- Renforcer la résilience énergétique via audits, contrats d’achat d’énergies renouvelables ou mesures d’efficacité.
- Structurer des filières locales d’approvisionnement pour réduire les coûts logistiques et sécuriser les débouchés.
- Mobiliser des financements mixtes (fonds propres, aides publiques, capital‑risque pour la R&D) et prévoir des paliers de financement pour la montée en cadence industrielle.
- Favoriser les accords industriels locaux (sous‑traitance, formation) pour capter l’effet d’entraînement des projets deeptech et agroalimentaires.
Perspectives pour la Gironde en 2026
Les signaux envoyés par les lauréats des Prix de l’économie Néo-Aquitains 2025 témoignent d’une double dynamique : montée en gamme de la transformation agricole et émergence d’activités high‑tech. Si ces trajectoires sont confirmées — par la mise en service de nouvelles lignes de production et la réussite des premières campagnes d’essai suborbitales — la Gironde pourrait voir se consolider un tissu industriel plus diversifié et plus résilient. Cependant, la réussite dépendra de la capacité des acteurs publics et privés à assurer la continuité des financements, l’accès à l’énergie à coûts maîtrisés et l’appui à la formation des compétences locales.
Pour les décideurs industriels et territoriaux, l’enjeu immédiat est de transformer les signaux positifs en chaînes de valeur durables. Les exemples girondins montrent que le mariage entre filières traditionnelles et innovations de rupture peut fonctionner, à condition d’un pilotage stratégique et d’un accompagnement financier et logistique cohérent.






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